A l'orée des bois [Chise & Erewen]

Le soleil courait déjà depuis quelques heures dans le ciel et allait bientôt atteindre don zénith quand Erewen vit les premières cimes se dessiner à l'horizon. La veille, il s'était rendu aux ruines de Pallanén pour y accomplir une petite quête qui devait lui rapporter un peu d'or et beaucoup de connaissances. Au moment d'en repartir, il avait décidé de prolonger son périple vers le nord afin de découvrir une région qu'il ne connaissait pas : les grandes forêts du nord. Après une nuit quelque peu agitée dans un pré immense totalement dépourvu d'abri, passée à chasser les mulots qui venaient partager sa couverture, il avait repris sa route et arrivait enfin en vue de la zone boisée.
Même de loin, les arbres paraissaient immenses et formaient une masse sombre qui contrastait avec les paysages Aerwôns. Les cimes étaient baignées d'une vive lumière, mais le soleil était trop paresseux pour réchauffer l'air et le dos du Faery. Erewen eut un frisson -peut-être que l'aspect peu rassurant de la forêt y était pour quelques chose- puis il rajusta la position de sa besace sur son dos et avança de plus belle vers l'orée des bois. Son pantalon de toile et sa tunique légère n'étaient pas idéales pour une promenade en forêt, il ne comptait donc pas s'éterniser. Et puis son commanditaire l'attendait au sud, avec une modique somme d'argent.
Au moment de quitter la vive lumière des plaines pour pénétrer l'obscurité partielle de la forêt, un mouvement attira son attention. Plus loin sur sa gauche, il reconnut une silhouette, probablement celle d'un elfe à en juger par la finesse. Erewen changea de direction et opta pour une approche de côté. Arrivé à quelques pas, il s'aperçut qu'il s'agissait d'une jeune elfe ou demie-elfe qui prenait son repas. Il se demanda si sa présence avait été remarquée, ne sachant pas trop à quoi s'en tenir avec les habitants des autres régions. Il n'avait vu que peu d'elfes mais celle-ci avait l'air assez... charmante.
Erewen continua de s'approcher -était-il conscient qu'il avançait presque sur la pointe des pieds?- et, quand il fut à porté de voix, il lança :

-Euh... Bonjour ! Je... ne vous dérange pas trop j'espère? Enfin, je vois que vous êtes en plein repas... c'est agréable n'est-ce pas, le soleil?

Il assortit cette entrée à un sourire mi-poli mi-inquiet sur lequel il comptait pour enjoliver ses traits durs et peu plaisants.

-Enfin, je ne dis pas ça parce qu'il n'y a pas beaucoup de soleil sous les arbres, mais... je veux dire, c'est agréable de pouvoir manger dans un endroit pareil...

Non, cette fois non plus il n'avait pas fait une entrée spectaculaire, tant pis.

De retour des les forêts du nord depuis quelques jours pour rendre visite à son père adoptif, Chise en avait profité pour reparcourir ces lieux si familiers qui l'avaient vu grandir. Son voyage en quète de vérité ne l'avait pas menée bien loin et elle n'obtint que de nombreuses autres versions de cette rumeur qui parcour Bered Hill. Elle s'était tout de même attardée dans les villages Aerwôn et Aqwôn près de la lisière où elle avait pu observer tant de personnes si différentes des elfs qu'elle avait toujours cotoyé. Heureusement elle avait appris plutôt facilement le language de ces peuples, peut être grâce à sa double origine qui pour une fois lui avait rapporté autre chose que du mépris. Elle s'était résolue à revenir à son point de départ, les choses auraient'elles vraiment changées en son abscence ? Qu'importe ... il lui fallait en apprendre plus sur l'origine des différents peuples et peut être que l'elf qui l'a éduquée peut lui révéler ce qu'il sait. Chise s'était souvent imaginé sa mère, étaient elles si différentes ? Tout en étant plongée dans ses pensées elle se rapprochait sans but précis des plaines quand son estomac la rappela a l'ordre.
Elle décida alors de s'installer sous les grands arbres de la lisière où on peut profiter de la brise qui la parcour et ne pénètre pas dans la forêt trop dense. Le calme de la plaine s'opposait à l'agitation qui peuple la forêt, et cette situation permit à Chise baignée d'un soleil bientôt au sommet de sa course d'appaiser ses doutes. Le peu de provisions qu'elle avait emporté suffiraient a stopper sa faim jusqu'à son retour. Alors qu'elle entamait son son repas sommaire, elle entendi un bruit de pas. Se voulant apparemment discret, elle décida de ne pas réagir tout de suite.
L'homme qui s'avançait finit par lui adresser la parole. Elle n'avait pas vraiment cotoyé de Feary et espérait ne pas être maladroite en répondant à ce jeune inconnu.

-Bonjour ! Non vous ne me dérangez pas... Il est vrai que le soleil à cette heure est vraiment reposant, il ne pénètre qu'en de rares endroits dans la forêt.

Elle observa un moment son interlocuteur avant de reprendre

-Mais ... que fait un aventurier dans un tel endroit ?

Erewen sursauta presque lorsque la jeune femme se tourna vers lui. Les rayons du soleil, illuminant son visage, faisait briller un diadème qu'elle portait au front. Ses traits fins resplendissaient à la clarté du jour et sa peau claire contrastait avec ses cheveux sombres. Erewen se demanda si toutes les elfes étaient aussi jolies et regretta un instant de ne pas être né au milieu des arbres. Mais son goût pour les grands espaces le rattrapa et fit revenir à lui ses origines. Seul face à celle qu'il venait d'aborder, il se sentit privilégié.

- Aventurier est un bien grand mot, dit-il en souriant, en fait j'arrive de Pallanén. Je suis venu par ici sans but précis.

Il hésita à déclamer son discours habituel sur son errance dans le monde en quête de connaissances diverses, n'ayant pour guide que sa foi et ses ressources matérielles, et préféré finalement s'abstenir. Aussitôt il continua :

- Mon nom est Erewen, je suis un pèlerin, et après avoir été cherché cette vulgaire pierre au milieu des ruines, je me suis dit que ce serait une bonne idée de prolonger ma route vers le nord.

En disant cela, il avait sorti une pierre grosse comme le poing de la bourse qui pendait à sa ceinture. Il la considéra un instant comme il l'avait fait des dizaines de fois déjà, tentant de percer un éventuel mystère, en vain.

-Ainsi donc me voilà. Je pensais longer la forêt vers l'ouest, de peur de me perdre si j'entrais dans cette immensité boisée afin de regagner plus tard la route qui mène à Mithrandir.

Il marqua une pause pour laisser à son interlocutrice le temps d'assimiler ce qu'il avait dit.

-Mais je ne voudrais pas vous ennuyer avec ma feuille de route. En fait, ça me surprenait de voir quelqu'un ici, à cet endroit si particulier. Vous savez, un peu la frontière entre deux mondes. D'un côté les plaines ensoleillées, et de l'autre la forêt ténébreuse... enfin presque... Bref, je vais vous laisser finir votre repas tranquillement bien entendu. Mais j'aimerais ensuite discuter avec vous au sujet de la forêt si cela ne vous dérange pas?

Histoire de donner un but à ce topic, voici une mini-quête à accomplir !
Chère Chise, il te faudra évidemment répondre à Erewen avant d'enchainer avec ce qui suit :


Le vent ne soufflait guère, le soleil peinait à réchauffer les corps, et c'est lentement que la forêt s'éveillait. Les animaux certes, mais aussi les arbres d'une certaine façon, dont un en particulier. Alors que les deux jeunes gens discutaient non loin de lui, un murmure s'échappa de son écorce :

-Venez je vous prie, venez m'aider... Il y a quelques jours encore j'étais un Géant, guerrier du clan Sylvain, mais un sorcier Aqwon m'a jeté un sort et me voici prisonnier de cette écorce. Nous étions censés nous partager des richesses découvertes dans la forêt, mais nous avons eu un différent et ce traître m'a piégé. Néanmoins, avant de partir vers l'ouest, il a eu un élan de pitié et m'a indiqué comment venir à bout de son maléfice. Il y a un oiseau multicolores non loin d'ici dont le chant est très particulier ; il est un élément de la clé. Pour lever le sortilège, il faut que cet oiseau chante perché sur une de mes... branches, tandis qu'un peu de sang de cerf doit couler dans une entaille de mon écorce... Auriez-vous la bonté de m'aider? Car évidemment, moi je suis immobile...

Le murmure disparu, laissant place à un silence pesant, aussitôt interrompu par le magnifique chant d'un oiseau au loin...

La surprise du Feary fit sourire Chise. Il avait réussi une entrée en scène assez ... particulière qu'elle trouva amusante. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas discuté tranquillement avec quelqu'un. Alors il se nomme Erewen et il vient de Pallanén.

-Venir par ici sans but précis, vous aimez voyager ?

En prononçant cette phrase Chise se rappela le parcours qui l'avait finalement ramené ici. Traverser les contrées de Bered Hill et découvrir de nouveaux paysages était devenu une véritable source de joie pour elle : elle ne révait que de pousser ce voyage toujours plus loin. Les bruits de la forêt qui évoquèrent les souvenirs qu'elle avait en cet endroit si merveilleux la sortirent de ses pensées.
Chise posa les yeux sur la pierre qu'Erewen tenait à la main.

-Qu'est ce qui peut bien rendre cette simple pierre digne d'une quète à sa recherche dans les ruines ?

Elle ne s'attendait pas vraiment à une réponse, il n'avait pas l'air très renseigné sur ce sujet. Elle considéra un instant le paysage dans la direction qui menait vers Mithrandir, le lieu de destination du Feary.

-Si vous ne voulez pas vous perdre dans ces forêts, il vous faudra un guide. Si vous avez du temps devant vous et que le coeur vous en dit je me ferais un plaisir de vous faire découvrir cet endroit. La lisière marque une frontière en effet, entre deux sortes de paysages mais aussi entre deux peuples, deux cultures ...

Un voile sombre passa sur ses yeux ... Chise n'arrivait finalement toujours pas à empécher certaines pensées de ressurgir.

-Enfin, la meilleure façon de se renseigner sur ce lieu n'est'elle pas de le visiter ? Vous me questionerez alors tant qu'il vous plaira.

La demie-elfe, pourtant habituée aux sons de ces bois, frissonna lorsqu'un murmure se fit entendre non loin des deux jeunes gens. Elle ne put s'empécher de s'avancer vers l'arbre dont le vent portait la complainte. Il évoqua son ancien statut de géant Sylvain, le piège de son complice, mais surtout, le moyen de briser le maléfice. Le chant d'oiseau qui se fit entendre toucha Chise au coeur. Elle ne pouvait se résoudre à laisser les choses telles qu'elles l'étaient et rangea les restes de son repas hâtivement.

-Je ne sais pas s'il y aura une quelconque récompense à aider cet ... arbre, mais je pense qu'une partie de chasse est un bon moyen pour favoriser la digestion.

Elle sourit à Erewen et tout en détachant son cheval, elle l'invita à se joindre à elle.

-Après votre périple je ne sais pas si vous souhaitez venir, cependant je vous ai proposé une visite guidée. Que diriez vous de m'accompagner à la chasse au cerf pour découvrir la forêt ?

Erewen se réjouit à l'idée qu'il venait de rencontrer une elfe bien moins sauvage qu'on ne pouvait l'imaginer, à voir dans quel lieu fermé et secret ils vivaient. Au contraire, cette jeune femme se montrait très sociable, chaleureuse même. C'est cette chaleur qui raviva la flamme de l'optimisme, inné chez le Faery, et agrandit son sourire.

- Voyager est mon métier si je puis dire ! A vrai dire, je prétends voyager sans but, mais mon but est justement de voir du pays !

Lorsqu'elle l'interrogea au sujet de la pierre qu'il s'apprêtait à ranger dans sa sacoche, Erewen expliqua à la jeune demie-elfe tout ce qu'il savait à son sujet :

- Eh bien... je n'en sais absolument rien, et ça me ronge de le découvrir. Mais cette quête n'était pas particulièrement difficile, cela m'étonnerait que cette pierre ait d'immenses pouvoirs. Je me suis même demandé si mon commanditaire n'était pas un collectionneur de beaux cailloux, et que celle-ci est la pièce manquante sur son étagère.

Il rit timidement, conscient qu'il avait certainement l'air ridicule à suivre les consignes d'un homme qu'il ne connaissait pas, dans le seul but de ramener une pierre qui lui vaudrait une récompense. Il essaya d'ailleurs de se rappeler le montant qu'il devait percevoir, en vain. Avait-il seulement tenter de négocier?
Le Faery se força à sortir de ses songes pour répondre aux propositions séduisantes de la jeune femme. Mais au moment où il ouvrit la bouche pour parler, il fut interrompu par une voix qui semblait être portée par le vent. Erewen, bouche bée, écouta attentivement.
Quand le récit fut terminé, Erewen retrouva un grand sourire qu'il adresse à la jeune archère.

- Peu importe la récompense, je crois que nous venons de trouver une bonne raison de nous engouffrer dans la forêt ! Je ne suis pas un excellent chasseur, mais c'est avec plaisir que je vous suis ! Allons-y !

Et Erewen commença à marcher, dans la direction d'où semblait provenir le chant de l'oiseau.